Marc Rastoin, «Simon-Pierre entre Jésus et Satan», Vol. 89 (2008) 153-172
In the history of research, Luke 22:31-34 has been on the whole judged to be a rather awkward composition consisting of traditional material and Lucan wording. This article intends to show the completely Lucan character of the passage as well as the theological meaning Luke attached to it. In these verses,
Luke reveals his literary mastery as well as his theological overall project in Luke-Acts: the primacy of Peter is rooted in the prayer of Jesus Christ himself during His Passion.
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orders the events he relates so as to show forth clearly God’s plan of
salvation behind those events. My analysis suggests that the third
evangelist also organizes his materials so as to create, at least in 12:13-
34 a rhetorically ordered and persuasive discourse†(32). Il avait relevé
auparavant que “chreiai involve a historical person and are frequently
expressed with a question and answer†(33). Ces éléments me paraissent
importants pour notre passage: réorganisation des sources en fonction
d’un dessein théologique précis, concision et construction en dialogue.
Il est cependant admis que Luc témoigne en général d’une grande
fidélité aux paroles de Jésus qui lui sont transmises par la tradition
marcienne. Comment se permettrait-il de créer ‘à partir de rien’ une
telle parole? Luc est-il capable de mettre dans la bouche même de
Jésus une parole dont il est fort improbable qu’il l’ait dite? Nous en
avons la quasi certitude avec le fameux “il est dur pour toi de regimber
contre l’aiguillon†de Ac 26,14 où Luc n’hésite pas à mettre une quasi
citation des Bacchantes d’Euripide (794-795) dans la bouche de
Jésus (34). Tentons de formuler une hypothèse: Luc pourra s’appuyer Ã
la fois sur la tradition du coq, présente en Marc 14, pour dire qu’il ne
fait avec cette prière que déduire une chose évidente: il est connu de
tous d’une part que Simon-Pierre a reçu de Jésus une mission
particulière unique dans l’Eglise après l’avoir, le premier, confessé
comme Messie et d’autre part, qu’il a renié et trahi son Maître lors de
la grande épreuve de la Passion. Pourtant, selon l’ensemble de la
Tradition, il est devenu témoin (voire le premier des témoins parmi les
Douze) de la Résurrection. Comment cela aurait-il été possible sans
que Jésus ne prie spécifiquement pour lui?! Luc a l’art de développer
des épisodes qu’il connaît par la tradition en leur donnant une couleur
unique fruit de son talent de conteur. Un autre exemple en est la façon
dont la parabole des deux fils, que Matthieu connait aussi et raconte en
deux versets Mt 28,20-22, devient chez lui une parabole si célèbre
qu’elle en est presque venue à être La parabole par excellence, celle
dite du Fils prodigue (Lc 15,11-32). Luc pourra toujours répondre qu’il
n’a fait que préciser ce que la parabole initiale laissait dans l’ombre:
les motivations des deux fils à faire, ou pas, la volonté du Père.
(32) STEGMAN, “Reading Lukeâ€, 352.
(33) STEGMAN, “Reading Lukeâ€, 332.
(34) Sur ce point, cf. C.F. EVANS, “The Kerygmaâ€, JTS 7 (1956) 25-41, ainsi
que H. WINDISCH, “Die Christusepiphanie vor Damascus und ihre
religionsgeschichtlichen Parallelenâ€, ZNW 31 (1932) 1-23 et A. VÖGELI, “Lukas
und Euripidesâ€, TZ 9 (1953) 415-438.