Jean-Noël Aletti, «La soumission des chrétiens aux autorités en Rm 13,1-7. Validité des arguments pauliniens?», Vol. 89 (2008) 457-476
Rm 13,1-7 has been interpreted in many different ways, often incompatible. This article is an attempt to show that this passage cannot be understood without its immediate context and also that its aim is neither to work out a political doctrine,
nor to ground the legitimacy of political power; nor does Paul push Christians to influence political life, but he urges them to overcome a possible attitude of fear and implicitly to extend their agape to all human beings. In doing so he innovates.
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davantage à l’obéissance (16), seulement à une soumission en
conscience, de bon gré (17). Chez Paul, en effet, la soumission, même
volontaire, n’équivaut pas à l’obéissance; elle consiste à reconnaître et
respecter un ou des statuts supérieurs, elle est l’attitude de l’inférieur,
alors que l’obéissance décrit une adhésion totale de la volonté, sans
d’abord considérer les statuts (celui de l’inférieur et celui du
supérieur). Qu’il s’agisse de reconnaître le statut des autorités,
l’argumentation le montre, qui insiste sur leur origine divine et leur
fonction, elle aussi ordonnée à Dieu, puisqu’elles en sont les ministres.
La question rebondit malgré tout. Pourquoi Paul cherche-t-il Ã
fonder théo-logiquement la légitimité des autorités politiques? Pour
favoriser la soumission et, qui plus est, une soumission en conscience,
puiques ces autorités font respecter la justice en récompensant le bien
et en punissant le mal. La légitimation divine des autorités vise Ã
justifier la soumission, le uJpotavssesqai, qui constitue l’exhortation
première et principale du passage (v.1 et 5). Mais, que Paul insiste sur
la soumission aux autorités politiques ne nous livre pas encore la clef
d’interprétation du passage.
Le motif du bien à faire qui court tout au long de Rm 12–13 (18) ne
fournit pas une clef d’interprétation plus sûre. S’il est vrai que Rm
13,1-7 doit être interprété en son contexte, comme le suggèrent O.
(16) Quoi qu’en dise O. WISCHMEYER, “Staat und Christenâ€, 155: “Nicht
Loyalität, sondern Gehorsam war gefordertâ€.
(17) En ce passage, Paul n’oppose pas la soumission en conscience à la
déloyauté, mais à la soumission par peur. L’appel à la suneivdhsi" ne signifie pas
ici “la priorité de la conscience par rapport au principe de l’autoritéâ€, comme le
déclare A. PITTA, “Rm 13:1-7: per un’etica politica cristianaâ€, Teologia ed etica
politica (éds. A. RODRÃGUEZ LUÑO – E. COLOM) (Roma 2005) 23, qui renvoie Ã
1 Co 8,7-12 et Rm 14,23, car Paul s’appuie sur le fait que l’autorité est d’origine
divine et sa performance positive pour inviter les croyants à se soumettre en
conscience. À propos du syntagme dia; th;n suneivdhsin (qu’on rencontre aussi en
1 Co 10,25.27), Jewett cite à ce propos Plutarque, De sera numinis vindicta
556.ab: tau'qΔ eJkavstou tw'n ponhrw'n th;n yuch;n ajnapolei'n ejn auJth'/ kai;
dialogivzesqai, pw'" a}n ejkba'sa th'" mnhvmh" tw'n ajdikhmavtwn kai; to; suneido;" ejx
eJauth'" ejkbalou'sa kai; | kaqara; genomevnh bivon a{llon ejx ajrch'" biwvseien. Par
cette racine (sun + eijdhsi") est décrite “a conscience-pang whose very presence is
painfulâ€. Également, toujours selon JEWETT, Romans, 797, les mots de cette racine
“refer to the spontaneous knowledge one has with oneself that a deed performed is
bad; such painful knowledge should be avoided, which leads to the peculiar
formulations in ancient literature about avoiding ‘conscience’ altogether,
understood as the painful ‘conscience-pang’â€.
(18) Les récurrences du motif du bien en ces deux chapitres: Rm 12,2.9.17.21;
13,3.4. Voir aussi Rm 14,16.21; 15,2).