Jean L'Hour, «Ré’shît et beré’shît encore et toujours», Vol. 91 (2010) 51-65
Prenant le relais d’une étude récente du premier mot de la Bible l’auteur développe son argumentation en faveur d’une signification concrète du mot ré’shît au sens de premier produit. L’examen du vocabulaire dans la Bible le conduit à voir dans l’usage cultuel et concret de ce terme le vivier où a puisé l’auteur de Genèse 1,1 pour formuler sa confession de foi en exergue du récit de la création et en programme de Torah — Loi et Histoire — pour les humains et pour Israël.
64 JEAN L’HOUR
réponse proposée aux humains pour qu’ils rendent à Dieu ce qui lui appar-
tient. Gn 1,1 est également le premier verset du Pentateuque et la réponse
attendue à ce “kérygme†n’est autre que la Torah tout entière, c’est-à -dire
toute l’histoire confessante d’Israël, laquelle acquiert de ce fait une dimen-
sion universelle.
* *
*
Au terme de ce voyage dans le sillage de ré’shît, il serait malvenu de
gommer la lecture faite de b eré’shît depuis plus de 2000 ans. L’idée de
“ commencement †ne peut de toute évidence être absente d’un mot qui fait
l’ouverture de la Bible, d’autant moins qu’elle n’est pas étrangère à celle de
“ prémices †et qu’elle ne peut manquer, en dépit de la grammaire, de faire
écho aux b eré’shît temporels. Toutefois il faut noter que l’acception pure-
ment temporelle dans l’histoire de la traduction, outre qu’elle a prêté le
flanc à des discussions sans fondement sur le thème de la creatio ex nihilo,
ne semble pas avoir été celle des anciennes versions de la LXX et, moins
encore, de la Vulgate qui ont opté pour des termes polysémiques — arxh et
ߥ
principium — lesquels ajoutent sotto voce à l’idée de temporalité celle
d’exemplarité fondatrice. A cette polysémie déjà inscrite dans les
anciennes versions la mise en évidence de la nature concrète de ré’shît au
sens de premiers produits et de prémices cultuelles ajoute encore un autre
champ de signification: celui du culte et de l’histoire d’Israël comme
reconnaissance et, peut-être, poursuite de l’acte de création. Ainsi peut
s’élargir, sous le regard du lecteur, l’horizon du b eré’shît de la Genèse qui
restera de toute façon un hapax dans la littérature biblique. Aucune traduc-
tion ne saurait en rendre toute la polysémie, il importe seulement de la
laisser ouverte 48.
9 Impasse du Sablet Jean L’HOUR
31240 L’Union, France
des P mit seiner Fassung der Schöpfungsgeschichte gewiss nicht blosse Inter-
pretation. Er will vielmehr darin etwas Bestimmtes von Gott, von Gottes
Wirken sagen, also in irgendeinem Sinn verkündigen. Seine eigentliche Absicht
ist eine assertorische, keine bloss erklärendeâ€.
C’est la raison pour laquelle les traducteurs de la La Bible Nouvelle
48
Traduction (BNT; Paris 2001) 32 et 2732-2733 ont opté pour “Premiers†de
préférence à “prémices†afin de conserver l’ambivalence du terme ré´shît, Ã
cheval sur les champs sémantiques du culte et de la temporalité.