Jean-Noël Aletti, «Jn 13 – Les problèmes de composition et leur importance», Vol. 87 (2006) 263-272
The thesis developed in this short paper is clear-cut: in order to single out the
dispositio of John 13, different and complementary approaches are required. If, in
a first step, it is helpful to collect lexical parallelisms (chiastic and alternate), it is
even more useful to determine the discursive function of the subunits (introduction,
etc.) and the respective viewpoints of the narrator and of the main character (Jesus).
In other words, a one-track approach must be at all costs avoided.
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les propos explicites de Jésus (vv. 10, 18 et v. 21), indiquent en effet une claire
insistance sur la trahison. En n’annonçant pas le reniement dans l’introduction
(vv. 1-5), le narrateur sépare en quelque sorte le reniement et la mort de Jésus –
le reniement ne la causera ni ne la précipitera. Placée en fin de macro-unité, cette
annonce met néanmoins un point final à l’ajgavph eij" tevlo" de Jésus pour les
siens; en ce sens donc, le v. 38 souligne l’extrême de cette ajgavph.
4. Composition et interprétation
a) L’ordonnancement des éléments en Jn 13
Repérer une dispositio ne suffit pas. Nous avons en effet constaté que les
scènes du récit (vv. 6-38) reprennent les thèmes a, b et c de l’introduction en
une reversio C, B et A. Est-il possible d’expliquer pourquoi le narrateur
procède ainsi? Comme telle, nous l’avons déjà signalé, l’analyse structurelle
peut repérer des parallélismes (alternés ou concentriques), mais elle ne peut
en rendre compte. Seule la distinction (discursive) entre l’introduction (ou
s’exprime le point de vue du narrateur) et les développements scéniques
subséquents (où domine le point de vue de Jésus) permet de déterminer le
rationale de l’ordonnancement. Pourquoi, par exemple, le lavement des pieds
est-il narré avant l’annonce de la trahison? Pourquoi le commandement de
l’ajgavph est-il donné seulement après le départ de Judas? Dans les dévelop-
pements narratifs (vv. 6-38), Jésus ne le dit pas. Mais on peut répondre à ces
questions en analysant de plus près les vv. 1-5. C’est en effet dans l’intro-
duction que les relations entre les différentes thématiques sont énoncées
brièvement mais nettement par le narrateur, en particulier celles entre la
trahison et l’heure de Jésus (heure du retour à Dieu, de la mort et de la glorifi-
cation), entre le lavement des pieds et l’heure, entre le lavement des pieds et
l’ajgavph eij" tevlo" de Jésus, etc. (24). En ces vv. 1-5, le narrateur laisse explici-
tement entendre que le déroulé du récit, commencé aux vv. 4-5, sera une
symbolisation et une exemplification de l’ajgavph eij" tevlo" (v. 1). Il nous
indique ainsi son propre rôle, qui est d’expliciter le rationale de l’enchaîne-
ment des événements entre eux, un rationale que le corps du récit lui-même
n’aura dès lors plus à fournir.
Comme l’introduction (vv. 1-5) semble faire dépendre la composante
narrative (vv. 6-38) de la rhétorique (discursive), il importe de se demander si
la dynamique de Jn 13 est plus discursive que narrative. En d’autres termes,
y a-t-il une intrigue de résolution, et quelle est-elle? N’est-ce pas plutôt
l’intrigue de révélation (des composantes de l’ajgavph), en sorte que la
succession des scènes doive être interprétée comme progression dans l’ajgavph
eij" tevlo"? Autant de questions soulevées par la dispositio et son ordonnance-
ment. Mettre à jour la dispositio de Jn 13 est ainsi déterminant pour
l’interprétation des motifs et des thèmes du chapitre et des suivants.
b) Jn 13 et Jn 14-17
L’exégète ne peut en effet en rester à Jn 13. Il doit aussi se demander si
le fait que les vv. 31-38 font partie de l’introduction aux deux discours
(24) Voir le rapport (de causalité) existant entre les participes circonstanciels (eijdwv",
ajgaphvsa") et les indicatifs (hjgavphsen et ejgeivretai, etc.).