Albert Vanhoye S.J., «La définition de l’"autre évangile" en Ga 1,6-7», Vol. 83 (2002) 392-398
A punctuation which divides in two the expression ou)ka!llo ei) mh/ brings some exegetes to say that Paul, in Gal 1,6-7, denies the existence of any other gospel. But if one respects the unity of the greek expression, one sees that Paul denies only the authenticity of another gospel. He does not deny the existence of two legitimate forms of evangelization (cf. Gal 2,7).
e#teroj signifie "autre en parlant de deux", mais cette nuance ne s’est pas toujours maintenue dans la koinè. !Allojet e#teroj y sont pratiquement interchangeables pour exprimer l’altérité. Celle-ci, évidemment, peut être qualitative ou simplement quantitative. Autrement dit, le mot "autre" peut désigner un autre différent ou un autre semblable. Le mot français n’exprime pas par lui-même cette distinction; c’est le contexte qui la révèle. En grec, certains auteurs estiment que la nuance est exprimée par la différence entre a!lloj et e#teroj; mais ils ne sont pas d’accord sur la distribution des deux significations: selon les uns, e#terojsignifierait "un autre d’un genre différent" et a!lloj "un autre du même genre"; selon les autres, le rapport serait inverse; e#teroj: "un autre du même genre"; a!lloj: "un autre d’un genre différent"3.
En réalité, les deux termes, a!lloj et e#teroj, peuvent l’un comme l’autre désigner soit "un autre du même genre" soit "un autre d’un genre différent". Lorsqu’on veut dire explicitement "un autre du même genre", on ajoute toiou=tojet cela, aussi bien avec a!lloj qu’avec e#teroj.En l’absence de toiou=toj, les deux termes n’expriment par eux-mêmes que l’altérité, sans préciser.
Il n’est donc pas possible de voir en Ga 1,6 un contraste entre e#teron et a!llo et de traduire: "passer à un autre évangile, d’un genre différent, qui n’est pas un autre du même genre". Un commentaire récent, qui s’appuie sur l’opinion de Burton, adopte pourtant cette interprétation tautologique et propose une traduction qui élimine, dans le second cas, la notion d’altérité et n’y conserve que la connotation de similitude, supposée présente. On obtient alors: "turning to a different gospel – which is not at all the same gospel"4. Cette traduction élimine complètement la contradiction que présente le texte de Paul, lorsqu’on met une forte ponctuation avant ei)mh/, mais cette élimination est obtenue au moyen d’un procédé inacceptable, qui consiste à occulter le sens propre d’un terme et à le remplacer par une possible connotation non exprimée. On aboutit ainsi à transformer une négation d’altérité en négation d’identité et à attribuer à a!llo le sens de to_ au)to/.
La forte ponctuation pousse d’autres traducteurs à prendre beaucoup de libertés avec le texte. On peut observer différents stades d’infidélité:
Au lieu de traduire: "un autre évangile, qui n’est pas autre", on traduit: "un autre évangile, qui n’en est pas un autre"5. L’infidélité est à peine sensible. Elle semble se maintenirdans des limites acceptables. En fait, cependant, elle équivaut à substituer,dans le texte, "évangile" à "autre". Au lieu de: "un autre évangile, qui n’est pas autre", on dit: "un autre évangile, qui n’est pas un évangile".
Cette substitution apparaît nettement dans la traduction anglaise du dictionnaire de Bauer. Dans l’édition allemande, la traduction de Ga 1,6-7 est: