Marcel Beaudry - Étienne Nodet, «Le Tigre et lEuphrate en Benjamin», Vol. 79 (1998) 97-102
This is a study of the origin of the names of two places to the north-east of Jerusalem: wa3dy (n-Nimr(w. of the leopard) and wa3dy (l- Gazal (w. of the gazelles). Basing themselves on biblical texts, rabbinic interpretations and the writings of Flavius Josephus the authors suggest seeing these two names as a transposition of the names of the rivers Tigris and Euphrates to the territory of the tribe of Benjamin.
le Liban jusqu'au grand fleuve, prt, et jusqu'à la grande mer", on peut comprendre ce prt (qui est mis en apposition) comme limite orientale (pour inclure les tribus de Transjordanie, ce que suggère 1 Ch 5,9, d'où la traduction de la TOB), mais Rashi le voit comme limite nord, donc englobant nécessairement la Syrie. Il s'agit donc bien ici de l'Euphrate.
II
Pour notre propos, Rashi donne cependant encore quelques renseignements. Sur Gn 2,14 il explique que h[dql ("Tigre") a des eaux "fines et légères" (h[gyn wqlyn), par jeu de mots inspiré de Ha 1,8. Ces eaux sont parcimonieuses, alors que celles de prt ("Euphrate") sont abondantes (pryn wrbyn), par jeu de mots parallèle, et qu'elles soignent. Il est remarquable qu'il n'objecte pas Dn 10,4, où le grand fleuve est le Tigre (Théod. transcrit Eddekel), et non l'Euphrate.
Cette description asymétrique des
deux plus célèbres fleuves de la Genèse leur convient à vrai dire fort mal, puisque ce
sont deux cours d'eau majeurs d'importance semblable. De plus, on ne peut pas considérer
qu'elle soit gouvernée par les jeux de mots indiqués, car ceux-ci ne sont qu'un ornement
et n'imposent rien. Au contraire, l'indication d'un contraste entre les deux fleuves
s'adapte bien à la différence entre le w. Fa3ra, alimenté par la source pérenne de même nom (quelque 1 200 m3 par
jour) et le w. )l-Nimr adjacent, qui n'est qu'un ravin
sans source permanente.
Quant aux eaux qui guérissent signalées par
Rashi, où les chercher ?
Selon Gn 10,19, la frontière du Cananéen,
après Sodome et Gomorrhe, arrive jusqu'à Lésha (ls0(,
LXX Lasa). Le targum palestinien (Neof., Ps.-Jon.)
rend ce dernier nom par "Callirrhoé"10 (qlrhy
Kallirro/h), station thermale connue 11: il s'agit de sources sulfureuses chaudes, aux
propriétés médicinales reconnues, qui débouchent au nord-est de la mer Morte. Josèphe
raconte qu'Hérode, très malade, y prit en vain des bains chauds (G 1:657, AJ
17:171).
Ce nom est ensuite ajouté par Ps.-Jon. à Dt 1,7, à propos du pays des Cananéens et de la terre promise "jusqu'au grand fleuve, le fleuve Euphrate". Le rapprochement entre l'Euphrate et Callirrhoé pourrait avoir un sens, si cette station était décrite par les textes que pouvait connaître Rashi. Tel n'est apparemment pas le cas, bien que l'endroit soit connu des anciens géographes. De fait, la région de Callirrhoé comporte plusieurs sources thermales, car la géologie s'y prête 12, ce qui n'est pas le cas de la région d'(E"n Fa3ra.