Christian-B. Amphoux, «Le Canon du Nouveau Testament avant le IVe Siècle», Vol. 21 (2008) 9-26
The recent debate on the date of the Muratori Canon has allowed it to be established that this was the first known list of Christian writings. But from the text called 'western', a stage is reached that is prior to the forming of the New Testament, whose history ranges from Clement in Rome, before the year 100, to Polycarpus, at the end of his life, around year 160, by way of Ignatius of Antioch, Marcion and Justine. The canon for the books of the New Testament is almost completely established towards the year 160, as a result of the dual tradition that comes at the same time from Antioch and Ephesus, written within the Jewish-Hellenistic culture, which will soon be abandoned in favour of the Greek-Roman culture.
Le Canon du Nouveau Testament avant le IVe Siècle 23
l’abandon de la structure qu’ils formaient20; les écrits sont, en revanche,
conservés, mais non sans une profonde révision de leur texte.
A Alexandrie, les évangiles sont mis dans l’ordre Mt – Mc – Lc – Jn; la
Femme adultère et la Finale longue sont retirées, parce qu’elles n’ont plus
leur rôle à jouer; en de multiples passages, les liens qui unissaient entre
eux les évangiles sont abandonnés, entraînant une modification du texte,
avec le souci d’en préserver le contenu. Le deuxième sens, très présent
dans le “texte occidentalâ€, s’estompe, sans disparaître systématiquement:
l’objectif est d’atteindre un public beaucoup plus vaste. Et Celse est té-
moin pour les évangiles de ce travail de révision, vers 180.
A Antioche, un autre travail de révision est entrepris, attesté par le
type de texte “césaréenâ€, dont le premier témoin est Origène, à travers
quelques citations: plus conservateur que la révision alexandrine sur cer-
tains points, il lui arrive de s’écarter du texte antérieur plus radicalement
encore. L’objectif est le même qu’à Alexandrie: rendre le texte accessible
au plus grand nombre, par le biais de la lecture liturgique. Le NT est
toujours en deux corpus, mais les évangiles deviennent une tétrade, tandis
que les autres écrits sont regroupés; à Alexandrie, les Actes font partie du
corpus évangélique, et ce sont les épîtres de Paul qui forment un corpus
séparé, toujours vers 180, mais après la rédaction du Canon de Muratori,
alors que la réorganisation des évangiles se fait avant.
Le travail éditorial de Polycarpe n’en est pas moins fécond: son édition
impose le choix de tous les écrits du NT, à l’exception de Jude; et les écrits
apostoliques qui terminent les bibles grecques des IVe et Ve siècles, sans
avoir été retenus par Polycarpe, seront finalement écartés. Le texte de
Polycarpe, en revanche, subit de profondes modifications: l’éditeur n’a
pas senti venir la rupture culturelle et se situe toujours dans la continui-
té de celle du temple. Son œuvre nous est, toutefois, transmise, et nous
pouvons juger aujourd’hui de l’écart culturel considérable qui existe entre
les formes transmises du NT, soit par le texte alexandrin, soit par le texte
byzantin, et le vieux “texte occidental†fidèle à l’édition de Polycarpe, vers
160.
Conclusion
La première phase de l’histoire du canon du NT n’est pas encore
prise en compte, car elle se heurte à plusieurs difficultés documentaires.
Le P. Bodmer XIV-XV (P75) présente l’ordre Lc-Jn, ce qui renvoie à l’ordre attesté par
20
le Canon de Muratori (Mt-Mc-Lc-Jn). Le P. Chester Beatty II (P46) présente les épîtres de
Paul dans l’ordre décroissant de leur longueur, avec Hb après Ro et l’absence des Pastorales.